Free mobile: des nouveaux forfaits attractifs pour un nouveau modèle économique ?

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Le raz-de-marée provoqué par le buzz autour de l’arrivée de Free sur le marché du mobile n’aura échappé à personne cette semaine. Attendus comme une libération par la communauté toujours plus nombreuse des « freenautes », les forfaits proposés par la firme de Xavier Niel ajoutent enfin un peu de concurrence dans le marché très fermé du mobile. Malgré le froid enthousiasme de certains médias (non sans arrières pensées), cette annonce a mis une sacrée pierre dans le jardin des opérateurs historiques. A n’en point douter l’arrivée de Free sur le marché du mobile constitue une révolution qui, en plus de tirer les prix vers le bas, pourrait bien nous conduire à basculer vers un nouveau modèle.

1/ Le prix des forfaits aurait du baisser depuis bien longtemps

Nouveaux forfaits Free mobile

Très attendues les nouvelles offres de Free ont fait un buzz minutieusement orchestré par la marque

Quelques jours après la communication officielle, les offres de Free font surtout réaliser à quel point le prix des forfaits auraient pu (du ?) baisser depuis longtemps. Depuis l’arrivée du mobile en France le tarifs des communications n’a pas arrêter de croître, lentement mais sûrement. Et ce de façon symétrique pour chacun des trois opérateurs. La venue des opérateurs mobiles virtuels (MVNO) ne perturbant finalement que très peu cet équilibre, dans la mesure où l’on prenait bien soin de leur facturer suffisamment cher l’utilisation des réseaux pour ne pas qu’ils soient en mesure de présenter une offre concurrentielle. Cette croissance continue des tarifs a été maintenue alors même que les réseaux sont maintenant rentabilisés depuis longtemps… et que l’on a vu fleurir des offres à des prix terriblement plus attractifs à l’étranger (notamment dans les pays en voie de développement). Nous en étions arrivés à la situation absurde dans laquelle la communication mobile représentait une part plus importante dans le budget d’un Français que dans celui d’un citoyen d’Afrique ou d’Asie (pourtant dans un état de pauvreté extrême). Comment se faisait-il que téléphoner coûte aussi cher en France et soit aussi bon marché au Kenya ou en Inde ?

La raison est simple: l’innovation technologique a fait baisser drastiquement le coût de revient d’une communication téléphonique mobile. Avec la « voix sur IP« , transmettre du son sur des câbles réseaux « classiques » coûte désormais presque rien… C’est d’ailleurs ce qui permet aux fournisseurs d’accès internet de proposer des forfaits illimités vers les téléphone fixes du monde entier (et aussi mobiles pour le cas de la Freebox Révolution). Cela fait donc des années que les opérateurs de téléphonie mobile auraient pu baisser leur tarifs, comme ils l’ont fait dans les pays en voie de développement pour s’adapter aux pouvoir d’achat des gens. Seulement en France ils ont considéré que les consommateurs étaient suffisamment habitués à ce que téléphonie coûte un certains prix. Les 3 opérateurs historiques se sont donc contenté d’augmenter leur marge en maintenant leurs tarifs en fonction ce que les gens étaient prêts à payer. Plutôt que de répercuter la baisse de coût que la technologie permettait.

Quand on nous parle aujourd’hui de « contre attaque » de la part d’Orange, SFR ou Bouygues Telecom, cela fait doucement sourire… Si de tels tarifs étaient possibles (et nous savons que c’était le cas), pourquoi avoir attendu pour les proposer ? Surtout que les forfaits « low costs » qui ont fleuris depuis six mois l’ont été dans la perspective de contrer l’arrivée annoncée de Free, comme l’expliquait le Figaro au mois de Juillet. La vraie question à poser aujourd’hui c’est donc: est-ce qu’on nous aurait proposé toutes ces baisses de tarifs si un quatrième opérateur n’était pas arrivé pour rompre l’équilibre ? L’Association Française des Utilisateurs des Télécommunications (AFUTT) en doute : « Les propositions présentées par Free ce mardi 10 janvier marquent de réelles avancées qui justifient l’action continue de l’AFUTT en faveur de l’ouverture du marché à un quatrième opérateur. »

2/ Un accueil plutôt froid dans les médias « mainstream »

Mamie du Cantal, freenaute, Free

La "Mamie du Cantal", personnage sympathique apparut pendant le buzz résultant de la campagne de marketing viral de Free

Mardi, le jour de l’annonce des nouvelles offres de Free, alors que le buzz battait son plein sur Internet, certains grand médias ont surjoué la méfiance à l’égard du nouveau venu, quand ils n’ont pas tout bonnement éviter d’en parler (comme TF1 dans son journal de 13 heures). Quitte à frôler la désinformation. Comme par exemple lorsque l’on insistait sur le fait que le réseau était en cours de déploiement et qu’il ne couvrait que 20% du territoire (alors que Free a passé un contrat avec Orange pour palier au manquement), ou en expliquant que l’opérateur ne disposait pas encore de réseau d’agence (il a passé un accord avec toutes les chaînes de généralistes de la téléphonie).

Si les liens entre TF1 et Bouygues ou entre Canal Plus et Vivendi (propriétaire de SFR) peuvent expliquer en partie le peu d’enthousiasme dont les médias « mainstream » ont fait preuve à l’égard de Free, il faut sans doute voir un peu plus loin. Les 3 opérateurs historiques financent une part importante de la publicité des médias Français, que ce soit à coup de spots télé ou radio, ou de pleines pages dans les journaux.

De son coté Free a choisi le marketing viral pour son opération de communication sur ses nouveaux forfaits. Pas une page dans les journaux, pas un spot publicitaire à la télévision, tout juste quelques message de réclame à la radio… Certains médias ont donc choisi leur camp. Quitte a passer à coté d’un évènement qui fera date à coup sûr dans l’histoire de la téléphonie mobile en France.

3/ Et si nous gardions nos mobiles plus longtemps ?

L’autre inconvénient majeur mis en avant par les « sceptiques » sur l’offre Free concerne l’absence de fourniture du mobile avec les forfaits (comme c’est le cas chez les autres opérateurs). En effet depuis l’origine de la téléphonie mobile en France, les accords entre les opérateurs et les constructeurs ont conduit à un modèle économique qui est de faire subventionner les terminaux par les forfaits.

Avec le recul, ce système a pourtant deux effets pervers:

  • Il incite les constructeurs à ne pas faire du « solide », dans la mesure où les consommateurs changent de terminal à chaque renouvellement de forfait. Il est donc illusoire d’espérer se démarquer sur la durabilité. Ils fabriquent donc du jetable, proche de l’obsolescence programmée, et les gros constructeurs sortent au moins un nouveau modèle tous les deux mois sans qu’il n’ait d’innovation majeure.
  • Il incite les consommateurs à changer souvent de mobile, puisque de toutes façons ils les payent dans les forfaits (NDLR: les forfaits sans mobile – quand ils existent – ne sont guère moins chers). Aujourd’hui, on ne change pas de mobile parce que le précédent ne fonctionne plus, ou bine parce qu’il est dépassé technologiquement, mais parce que l’on nous en propose un plus « neuf » pour le même prix.
Nokia 3310, téléphone mobile

Sortie en 2000, le Nokia 3310 était le mobile inusable par excellence

Free ne fournit pas les mobiles, qui ne sont donc pas subventionnés par les forfaits comme c’était le cas jusqu’à présent. On n’a pas de forfait à 50€/mois dont 20€ servent en réalité à payer le crédit d’un mobile.

En regardant de plus près, cela fait 3 ans qu’il n’y a pas eu d’innovation majeure sur les terminaux mobile (en fait depuis l’arrivée de la géolocalisation GPS et de la 3G). Ce qui fait la différence entre un mobile d’aujourd’hui et un mobile de 2009 c’est globalement la résolution de l’écran et la taille de la mémoire interne. Est-ce que cela justifie un changement à chaque renouvellement de forfait ? Chacun aura sa réponse, chacun étant libre de changer de mobile quand bon lui semble… Mais est-il normal que l’on « force » tous les consommateurs à changer de mobile à travers le système de forfait subventionnant ?

Le modèle proposé par Free, qui sépare les deux produits – le forfait et le terminal – est en tous cas beaucoup plus lisible, et permettra à ceux qui le veulent de garder leurs mobiles plus longtemps, sans pour autant payer une part de forfait pour rien. Enfin, si ces consommateurs commencent à représenter une part significative, il deviendra probablement intéressant pour un constructeur de se remettre à fabriquer des produits plus résistants, pour satisfaire cette nouvelle population plus exigeante sur la durabilité.

Le modèle économique de surconsommation subventionnée de terminaux mobile qui prévalait jusqu’à aujourd’hui conduit à de véritables aberrations. En changeant de mobile tous les 12 ou 18 mois on contribue à un désastre écologique aussi inutile que stupide. En proposant un modèle différent et attractif, Free a le mérite d’ouvrir de nouvelles perspectives, qui pourraient rendre plus durable notre façon de consommer la téléphonie mobile.

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