La France est un pays où l’on évoque souvent la parité sans pour autant qu’elle ne devienne une réalité tangible. Pour preuve le récent recule du nombre de femmes au Sénat après les dernières élections. Depuis l’éphémère apparition d’Édith Cresson au poste de premier ministre il y a tout juste 20 ans, aucune femme ne s’est approchée d’un pouvoir majeur. Et le plus étonnant est que si l’élection d’une femme à la présidence de la république en 2012 constituerait un petit évènement dans l’Hexagone, la plupart des autres pays du monde ont déjà vécu l’accession de femmes au pouvoir. Il faut le dire : en matière de parité du pouvoir la France est à la traîne. Petit tour d’horizon.
Europe : une fracture Nord-Sud
Si l’on porte notre regard de l’autre coté de la mer Manche, les îles britanniques ne sont pas en retard en matière de parité. L’emprunte laissée par le premier ministre Margaret Thatcher constitue encore une marque au fer rouge sur le Royaume-Uni. Et sur le plan historique, l’Angleterre a connu plusieurs femmes au pouvoir. Là ou la Français se protégeaient des femmes par la loi salique, les Anglais ont une tradition de souveraines (et pas des moindres) avec notamment Élisabeth 1ere et Victoria. De son coté l’Irlande est aux mains des femmes depuis 1990, avec Mary Robinson et Mary McAleese qui se sont succédées à la présidence jusqu’à aujourd’hui.
En Allemagne les électeurs ont renouvelé leur confiance à la chancelière Angela Merkel en 2009 pour un second mandat. Mais comme souvent en matière d’idée avant-gardiste, les meilleurs exemples européens viennent des pays nordiques. Gro Harlem Brundtland est ainsi une figure historique de la politique en Norvège ou elle a été plusieurs fois ministre d’Etat. Au Danemark c’est actuellement Helle Thorning-Schmidt qui dirige le pays. En Islande Vigdis Finnbogadóttir a effectué 3 mandats successifs de présidente pour 16 ans de pouvoir. Enfin en Finlande, l’actuelle présidente, Tarja Halonen occupe la fonction depuis l’an 2000.
En Suisse Micheline Calmy-Rey est redevenu cette année présidente de la confédération helvétique après l’avoir été en 2007, en succédant à une autre femme Ruth Dreifuss (élue en 1999).
Dans les pays d’Europe du Sud – catégorie à laquelle la France semble appartenir – la parité du pouvoir est en revanche loin d’être une réalité. Pas de trace des femmes aux postes suprêmes en Italie, en Espagne, au Portugal ou en Grèce. On remarquera l’exception notable de la Turquie où Tansu Çiller a été premier ministre au milieu des années 90.
Amériques : une grosse poussée féminine en Amérique latine
Les États-Unis n’ont encore jamais connu de présidente. Seulement Hillary Clinton, finaliste malheureuse de la primaire démocrate face à Barack Obama, a bien failli être présidente en 2008. Et elle occupe aujourd’hui le poste de numéro deux du gouvernement avec le siège de secrétaire d’état (NDLR: ministre des affaires étrangères aux USA). Poste qui était d’ailleurs précédemment occupé par une autre femme dans l’administration Bush : Condolezza Rice. Coté républicain toujours, Sarah Palin et Michelle Bachmann occupe une place de choix dans les débats pour la primaire.
Toujours aux Amériques, si l’on se promène du coté des Caraïbes, Portia Simpson Miller est l’actuelle premier ministre de Jamaïque. Enfin, Pamela Gordon et Jennifer Meredith Smith ont été premiers ministres des Bermudes pendant plus de 10 ans. En Amérique centrale, Violeta Chamorro était présidente du Nicaragua dans les années 90, tout comme plus récemment Mireya Moscoso présidente du Panama.
Mais c’est en Amérique latine que l’on constate la plus grande poussée en matière de féminisation du pouvoir. S’engouffrant dans la voie ouverte par Michelle Bachelet élue présidente du Chili en 2006, Cristina Kirchner est élue présidente de la république d’Argentine en 2007 (dans un pays encore marqué par le rôle politique historique joué par Eva Peron). De même au Brésil Dilma Roussef a succédé à Lula en Janvier. Enfin il ne faudrait pas oublier Beatriz Merino qui fut la première femme premier ministre du Pérou en 2003.
Asie : les grandes nations aux mains des femmes
En Asie la plupart des grandes nations sont ou ont été gouvernées par des femmes. En Inde, « la plus grande démocratie du monde », Pratibha Patil préside actuellement de la destinée de plus d’un milliard de citoyens. Et la féminisation du pouvoir est loin d’être une nouveauté pour les Indiens puisque Indira Gandhi a dirigé par le passé le pays pendant 15 ans, une première mondiale à cette époque.
Même le Pakistan, régulièrement présenté comme un pays obscurantiste, a déjà été dirigée par une femme. En effet Benazir Bhutto a connu deux mandats de premier ministre avant d’être assassinée en Décembre 2007. Le Pakistan est en revanche le seul pays musulman de cette liste.
L’Asie est globalement très en avance sur le plan de la parité du pouvoir, les exemples sont très nombreux. Corazón Aquino et Gloria Macapagal-Arroyo ont toutes deux été présidentes de la République des Philipines, Sheikh Hasina est l’actuel premier ministre du Bengladesh. Sirimavo Bandaranaike a été régulièrement présidente du conseil des ministres au Sri Lanka depuis 30 ans… Etc
On se rappellera, pour revenir au Proche Orient, aussi du rôle majeure de Golda Meir personnage incontournable de la création d’Israël, qui fut aussi premier ministre de l’état hébreux.
Enfin, en Océanie la Nouvelle-Zélande a été successivement dirigée par deux femmes, Jennifer Shipley et Helen Clark de1997 à 2008.
Afrique : de moins en moins extraordinaire
Dans les années 90 l’Est de l’Afrique a connu une brève effervescence féminine. Agathe Uwilingiyimana a été premier ministre du Rwanda en 1994, avant d’être assassinée par la garde présidentielle au moment de se rendre dans les locaux de Radio Rwanda pour lancer un appel au calme. S’en suivra le terrible génocide rwandais. C’est à cette époque aussi que Sylvie Kinigi fut une éphémère présidente de la République du Burundi voisin.
Plus récemment, au Libéria Hellen Johnson Sirleaf a été la première présidente élue au suffrage universel du continent. Elle a d’ailleurs reçu cette semaine le prix Nobel de la Paix.
Les lignes bougent donc en Afrique et il arrive de plus en plus souvent que des femmes accèdent à des postes importants. Mame Madior Boye fut par exemple premier ministre de Abdoulaye Wade au Sénégal, mais aussi Luísa Dias Diogo premier ministre du Mozambique de 2004 à 2010.
La France se retrouve donc en queue du peloton international quand il s’agit de confier le pouvoir aux femmes. Une position peu recommandable, aux cotés de la Chine de la Russie ou du Japon, mais aussi de la plupart des pays musulmans (exception faite du Pakistan et de la Turquie).
Même si Ségolène royale a butté sur la dernière marche en 2007, il n’y a rien de franchement nouveau sous le soleil de la parité dans notre pays. Il est peut être temps que la France, pays des droits de l’Homme, qui a porté de nombreuses réformes féministes d’avant-garde (comme la loi Veil), se remette enfin dans le sens du progrès. En 2012 ?
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