Kenya : au nom de la rose (1/2)

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En Juillet 2010 Pandora Vox s’est rendu au Kenya. Au cours de notre périple nous avons fait étape à Naivasha, région dont l’activité économique principale est la culture de fleurs pour l’exportation. L’eau du lac Naivasha, le climat clément des hauts plateaux d’Afrique de l’Est et la qualité des sols d’origine volcanique font de la « vallée des roses » un endroit parfait pour l’agriculture florale. Retour en deux volets sur une activité économique au cœur de la mondialisation.

Première partie : Une activité florissante.

1.1 La vallée du Rift ou le paradis des agriculteurs

Naivasha au Kenya (Googlemap)

La ville de Naivasha et son lac se trouve dans la vallée du Rift. Un couloir entre deux plaques tectoniques qui descend de depuis la Syrie jusqu’au Mozambique. Parsemé de volcans de volcans éteints, ce phénomène géologique prend à l’Est de l’Afrique (Éthiopie, Kenya, Tanzanie) des allures de hauts plateaux, fertiles et étonnamment tempérés pour une latitude si proche de l’équateur.

Si bien que cette région du Kenya est rapidement devenue, au moment de la colonisation Anglaise, le paradis des agriculteurs. Grâce à la présence d’eau et de roches volcaniques, couplée à une température idéale quasiment toute l’année (l’équateur traverse le Kenya), il n’y a pas besoin de respecter les saisons pour la culture de nombreux produits. On peut ainsi replanter juste après la récolte et en cumuler plusieurs par an.

1.2 Les fleurs font vivre toute la région (et même le pays)

C’est John, chauffeur de taxi, la cinquantaine, qui nous conduit à Naivasha depuis Nairobi. Ayant eu vent de l’activité florale de la région, nous l’interrogeons sur ce qui fait la réputation internationale de sa ville. « Les fleurs font vivre à peu près tout le monde ici. Directement ou indirectement. » explique-t-il d’emblée. « Ma sœur et mon beau frère sont ouvriers agricoles dans les serres. Et moi, en dehors des touristes qui viennent visiter Hell’s Gate, Longonot ou Nakuru (NDLR : parcs nationaux de la région), je transporte surtout des gens en lien avec les compagnies florales« .

Une activité économique accueillie comme un bol d’oxygène dans un pays qui compte 40% de chômage… En 2007, la culture florale représentait 45% des ses exportations horticoles en général, soit un apport de plus de 455 millions de dollars US sur l’année. Au total, au Kenya, 50 000 personnes vivent de la floriculture, et les activités secondaires qui en découlent fournissent du travail à plus d’un million de kényans.

John insiste en expliquant que pour les milliers de kényans accourus des régions les plus pauvres du pays, la province de Naivasha est synonyme de “vallée du bonheur”, car c’est une opportunité unique d’échapper à la misère. Nous comprenons aussi à ce moment que dans le débat interne qui oppose les habitants de la région, John fait partie des ardents défenseurs de l’industrie florale.

Les berges paradisiaques du lac Naivasha

Les berges paradisiaques du lac Naivasha (photo @PandoraVox

Il poursuit en expliquant que l’activité florale n’a commencé au Kenya qu’en 1972 (soit bien après l’indépendance, obtenue en 65), et qu’en quelque années ils sont devenus le premier producteur mondial de fleurs avec près de 150 fermes recensées au Kenya. La ville de Naivasha a beaucoup grandit ces dernières années que l’activité florale se mondialise. En cherchant nous apprenons qu’en 10 ans sa population est passée de 50 000 habitants à 250 000 habitants !

1.3 Une activité inscrite dans la globalisation économique

John nous détaille ensuite le commerce des fleurs. Les entreprises sont essentiellement étrangères : Indiennes, Néerlandaises ou Israéliennes et se sont implantées pour la plupart dans la région ces quinze dernières années.

Serres de roses gigantesques (Webshots)

Les fleurs sont cultivées dans les serres puis cueillies à Naivasha. Elles sont ensuite transportées en camion sur Nairobi, où un avion les transportera pour l’Europe. En 24H les roses passent des serres kényanes aux marchés de grossistes européens. Il faudra ensuite une autre journée pour qu’elles rejoignent les étales de nos fleuristes.

Rares sont les consommateurs français à imaginer que quelques roses achetées au marché ont été cueillies 48 heures plus tôt dans les hauts plateaux de l’Afrique de l’est… C’est la magie de la mondialisation ! Le plus impressionnant est que ces fleurs restent abordables comparés aux fleurs produites en Europe.

1.4 Le rôle social des entreprises florales

Habitations fournies aux ouvriers par la société Karuturi (photo @PandoraVox)

Alors que nous sommes sur le point d’arriver à destination, John termine sont plaidoyer en faveur de l’industrie florale en évoquant l’implication sociale des plus grosses compagnies.

En effet la région ayant subit une croissance hors norme (pour rappel la population de Naivasha a quintuplée en 10 ans), les sociétés ont pris le relais d’un État surchargé et défaillant (et souvent corrompu). Ainsi les compagnies les plus importantes – qui fournissaient déjà traditionnellement un logement à leurs employés – ont construit des hôpitaux, des écoles, des maternités etc… pour les ouvriers agricoles. Ce qui fait de la région de Naivasha la mieux desservie en service public du Kenya (avec celle de la capitale Nairobi).

Nous prenons alors congé de notre compagnon du jour – qui fut de fort agréable compagnie – et nous le remercions chaleureusement pour ses renseignements. Nous décidons de chercher dès le lendemain un interlocuteur de l’autre camp : ceux qui pensent que l’industrie florale est une catastrophe pour Naivasha.

La seconde partie de cet article, intitulée : les fleurs du Mal sera publiée la semaine prochaine.

Sources :

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